Sécurité routière : changeons les règles du jeu
L’équipe de Piétons Québec
L’hécatombe chez les piétons a démontré l’énorme rattrapage que le Québec doit faire pour rendre nos milieux de vie sécuritaires pour les personnes qui s’y déplacent à pied. La réaction populaire qui s’en est suivie l’a démontré: on ne veut plus traiter les décès de piétons comme faisant partie des règles du jeu.
C’est pourquoi, le 11 janvier dernier, des organisations de la société civile réclamaient au gouvernement du Québec l’adoption d’une stratégie gouvernementale de sécurité routière.
La sécurité des piétons est un enjeu national. Chaque personne doit avoir le même droit de revenir à la maison, en vie, peu importe son mode de déplacement, peu importe son lieu de résidence. Surtout que l’on sait comment faire pour prévenir les décès piétons.
Un système routier dépassé
Pour une personne qui se déplace à pied, une collision a de grands risques d’être mortelle au-delà de 30 kilomètres par heure. Lorsqu’on autorise des vitesses plus élevées, il faut donc prévoir des aménagements qui évitent aux piétons de se trouver exposés au danger de la circulation motorisée et qui contribuent à la ralentir.
On les connaît, ces aménagements: des trottoirs suffisamment larges, des saillies qui rétrécissent la chaussée à traverser, des îlots centraux où se réfugier, des intersections surélevées, etc. On sait que l’on conduit plus vite sur une rue plus large, qu’on tourne plus vite quand le rayon de virage est trop généreux – et qu’inversement, on ralentit lorsque les rues et les voies sont plus étroites et mieux encadrées par des bâtiments ou des arbres.
On l’a compris, d’ailleurs. La Sûreté du Québec a adopté l’approche vision zéro décès et blessés graves. Les Villes de Montréal, Drummondville, Trois-Rivières, Québec et Gatineau mettent en œuvre cette approche ou s’en inspirent dans leur stratégie de sécurité routière.
L’approche vision zéro décès et blessés graves est simple. Elle consiste à empêcher physiquement qu’une personne soit soumise à un choc qui risque de la tuer, qu’elle se déplace à pied, à vélo ou en voiture. On parlera ainsi non seulement de comportements prudents, mais surtout de vitesses, de rues et de véhicules sécuritaires.
Mais bâtir des rues sécuritaires ne sera pas suffisant. Les véhicules qui y circulent doivent aussi prendre en compte la sécurité des usagers à l’extérieur de ceux-ci. Avec l’augmentation du parc automobile et surtout des VUS dans les dernières années, ce sont des risques supplémentaires qui mettent en danger les personnes plus vulnérables à pied, comme les enfants et les personnes âgées, notamment en raison de leur plus grande masse et de leurs angles morts. En effet, les VUS sont deux fois plus souvent impliqués dans des collisions avec des personnes se déplaçant à pied qu’une voiture.
Changement de culture routière
On sait donc quoi faire, mais le défi reste entier pour vaincre l’inertie et mettre en œuvre ces solutions systématiquement au Québec. Il nous faut une stratégie gouvernementale de sécurité routière. Afin de révolutionner notre système routier, notre culture, notre aménagement du territoire, nos lois et notre Code de la sécurité routière, nos normes d’aménagement, la formation des professionnels qui façonnent nos milieux de vie ; parce que tout est encore trop centré sur la fluidité des déplacements motorisés, souvent au détriment de la sécurité des usagers vulnérables.
Nous sommes à la croisée des chemins : soit on continue de ne pas voir de problème, soit on agit et on prévient d’autres drames humains. Nous devons continuer de nous mobiliser pour faire en sorte qu’à chaque intervention et réfection de rues, les besoins des enfants et des personnes âgées soient pris en compte, qu’ils puissent s’y déplacer et traverser en sécurité pour les 25 prochaines années!