Allergies alimentaires en milieu scolaire : un encadrement insuffisant au Québec


L’équipe d’Allergies Québec
Chaque jour, à l’heure du dîner et de la collation, des milliers d’enfants fréquentant les écoles primaires du Québec s’installent pour manger. Pour la majorité d’entre eux, ce moment est plaisant et rassembleur. Pour les 75 000 enfants de la province vivant avec des allergies alimentaires et fréquentant un établissement scolaire, il s’agit d’une période nécessitant une importante vigilance.
Une réaction allergique survient lorsque le système immunitaire d’une personne méprend un aliment pour une menace et crée une forme d’attaque pour le combattre. Si elle n’est pas traitée adéquatement, celle-ci peut mener à l’anaphylaxie en quelques minutes.
Bien que cette condition médicale soit habituellement bien comprise et gérée par la personne allergique et ses proches, il est essentiel que l’équipe-école soit en mesure d’appliquer les bonnes pratiques de prévention, de reconnaître les signes et symptômes d’une réaction allergique, et de savoir poser les gestes en cas d’urgence. Or, ce n’est pas toujours le cas.
Une gestion inégale
Contrairement à toutes les autres provinces canadiennes, le ministère de l’Éducation laisse actuellement la responsabilité de la gestion des allergies alimentaires aux centres de services scolaires (CSS) et aux directions d’écoles, sans leur imposer de cadre standardisé. Un guide des bonnes pratiques en matière de gestion des allergies alimentaires en milieu scolaire circule depuis quelques années, mais mis à part une incitation à s’y référer, le Québec n’a toujours pas instauré de règles claires permettant d’assurer la sécurité de nos jeunes allergiques.
Actuellement, chaque établissement gère la situation à sa manière, ce qui crée une disparité au niveau de la prise en charge. Certaines écoles mettent en place des restrictions alimentaires strictes, alors que d’autres ne prennent que des mesures minimales. Cette inégalité expose les enfants allergiques à des risques accrus et crée un climat d’incertitude pour les parents.
Bannissement des allergènes : une solution inefficace
De nombreuses écoles ont choisi de réagir en bannissant certains allergènes, notamment les arachides et les noix. Aux yeux de plusieurs professionnels de la santé, cette interdiction pouvait fonctionner il y a quelques dizaines d’années, alors que les allergènes prioritaires se limitaient aux arachides et aux noix, mais aujourd’hui, les enfants sont allergiques à une multitude d’aliments.
Bien que plus de 160 aliments puissent causer une réaction, Santé Canada recense 9 allergènes prioritaires qui, à eux seuls, représentent 90% des réactions allergiques. Il est donc illusoire de penser qu’un bannissement à la pièce puisse fonctionner. On note qu’environ 20% des réactions allergiques graves se produisent à l’école, malgré ce type de mesure. Interdire certains aliments ferait en sorte qu’un sentiment de sécurité trompeur s’installe.
Formation et mesures de prévention : des priorités négligées
Plutôt que d’interdire certains aliments, les experts recommandent d’outiller tous les intervenants scolaires à la gestion des allergies, tant du côté de la prévention des réactions que des gestes qui sauvent lorsqu’elles se produisent. L’utilisation de l’auto-injecteur d’adrénaline, par exemple, devrait être un savoir de base dans les écoles. Pourtant, trop souvent, les enseignants et le personnel scolaire hésitent encore à l’administrer, retardant ainsi une intervention essentielle.
Un appel à l’action pour le gouvernement
Face à l’augmentation constante des cas d’anaphylaxie et à la montée du nombre d’enfants allergiques (de 6 % à 8 % de la population scolaire), il devient impératif que le gouvernement du Québec prenne des mesures concrètes. Allergies Québec et plusieurs spécialistes réclament une loi qui uniformiserait les pratiques et garantirait la formation obligatoire du personnel scolaire.
L’Ontario l’a fait, il y a près de 20 ans, suite au décès d’une jeune fille en milieu scolaire. Pourquoi le Québec tarde-t-il autant à protéger ses enfants ? Les parents ont droit à un environnement sécuritaire et équitable pour leurs enfants allergiques, où chaque école applique des protocoles clairs et efficaces.
À propos d’Allergies Québec
Allergies Québec est un organisme sans but lucratif fondé en 1990 par un groupe de parents d’enfants allergiques. Elle est aujourd’hui le plus grand centre de référence au Québec en matière d’allergies alimentaires et offre des services gratuits aux personnes touchées par les allergies et leurs proches.
Allergies Québec a pour mission de promouvoir la sécurité et améliorer la qualité de vie de ceux et celles qui doivent composer avec des allergies alimentaires par des programmes d’information, de soutien, d’éducation, de formation et de sensibilisation.
Elle regroupe des allergologues, des nutritionnistes, des pharmaciens, des institutions – écoles, garderies, hôpitaux – ainsi que des entreprises du secteur de l’alimentation.